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Le mot hijab signifie voiler, couvrir, cacher.  Et il va au-delà d’un simple code vestimentaire; il touche également aux limites morales et au respect de la femme.   Il joue un rôle dans la cohésion d’une communauté et dans le comportement modeste.  De nos jours, le mot hijab est devenu synonyme de foulard.  Sa signification fait parfois référence à certaines normes vestimentaires culturelles telles la burqa, en Afghanistan, le tchador, en Iran et le shalwar kamis, au Pakistan.  Le hijab revêt donc plusieurs significations, mais dans ces deux articles, nous ferons surtout référence au fait de se couvrir la tête et au hijab tel que décrit dans la Bible et la Torah.





Les premiers écrits historiques faisant référence au fait de se couvrir la tête, pour les femmes, remontent aux textes légaux assyriens du 13e siècle avant J.-C.  Seules les femmes de la noblesse se couvraient alors la tête.  Il était interdit aux prostituées, aux esclaves et aux femmes pauvres de faire de même.  Il existe des traces écrites faisant référence à divers couvre-chefs, chez les femmes, au sein des empires grec et romain.  À Rome, se couvrir la tête était associé à la prière et à la dévotion, tandis qu’en Grèce, certaines poteries et sculptures de l’époque mènent à croire que les femmes jugées respectables se couvraient la tête pour sortir de chez elles.  Au fur et à mesure des découvertes historiques et archéologiques, les opinions sur le sujet varient, mais il demeure certain que le fait de se couvrir la tête, chez les femmes, était bel et bien une réalité de l’époque.





Fait intéressant, les versets bibliques auxquels font référence les chrétiens pour justifier que les femmes doivent se couvrir la tête, particulièrement en prière ou à l’église, viennent des lettres de Paul aux Corinthiens.  Corinthe était une ville située sur la péninsule du sud de la Grèce et faisait partie de l’empire Romain à l’époque où ces lettres furent écrites.  Comme on y trouvait un mélange de cultures, grecque, romaine et juive, il est pertinent de se demander quelles normes culturelles dominaient alors.





1Corinthiens 11:5 dit : « Mais si une femme prie ou prophétise la tête non couverte, elle outrage son chef à elle, car elle se place ainsi sur le même plan qu'une «femme tondue». »  Les femmes chrétiennes d’autrefois se couvraient la tête non seulement à l’église, mais aussi en public, et elles perpétuèrent cette pratique jusqu’aux 19e et 20e siècles (selon les pays), avant qu’elle ne décline rapidement par la suite.





À Corinthe et à travers l’histoire du christianisme, le fait de se couvrir la tête était considéré comme un signe de soumission à l’autorité, à Dieu et au mari (c’est toujours le cas chez certaines dénominations chrétiennes).  Les chrétiens du second siècle, en Égypte, furent exhortés, par le théologien Clément, à « … se rendre à l’église décemment vêtus, d’un pas naturel, en silence, avec un amour sincère, un corps et un cœur purs, prêts à prier Dieu.  Que la femme respecte en plus cette règle : qu’elle soit entièrement couverte, à moins qu’elle ne soit dans sa maison.  Car cette façon de se vêtir est austère et la protège des regards.  Et elle ne doit jamais fauter ni inviter les autres à fauter en découvrant son visage.  Tel est le souhait de Dieu, qu’elle prie en étant voilée. »[1]





Les racines historiques du voile en Europe occidentale remontent à l’empire byzantin, où l’on attribuait un haut rang social aux familles dont les femmes se voilaient la tête.  Au Moyen-Âge, il était de coutume, chez les femmes mariées, de couvrir leurs cheveux de différentes manières.  Des peintures de femmes urbaines, en Europe occidentale, montrent souvent des femmes dont seuls le visage et les mains sont découverts.  À l’époque, les ouvrières et les paysannes qui ne se couvraient pas étaient considérées comme « faciles ».  On retrouve également ce caractère « non-respectable » des femmes découvertes dans le Coran, qui affirme que le fait de se couvrir est un signe de dignité pour les croyantes.





« Ô Prophète!  Dis à tes épouses, à tes filles et aux femmes des croyants de ramener sur elles leurs grands voiles [lorsqu’elles se déplacent à l’extérieur].  Elles en seront plus aisément reconnues et éviteront d’être importunées. » (Coran 33:59)





      Lorsqu’une chrétienne décide d’entrer chez les sœurs, on dit qu’elle « prend le voile ».  À travers l’histoire chrétienne, les religieuses ont toujours été facilement reconnaissables grâce à leurs habits particuliers, qui ressemblent à ceux des musulmanes.  À l’époque médiévale, en Occident, les femmes mariées couvraient habituellement leurs cheveux à l’extérieur de leur maison.   C’est ainsi qu’on leur accordait le même respect que l’on accordait aux religieuses, qui se vêtaient de façon modeste.





Certains indices suggèrent que le fait de se couvrir la tête, en Espagne, fut influencé par la présence des musulmans en Andalousie et par les musulmanes de l’Afrique du Nord voisine.  La mantille, cette petite écharpe de dentelle qui était d’usage, entre autres, dans l’Espagne de la fin du 16e siècle, était presque toujours utilisée lors des messes catholiques à travers le monde.  La reine Isabelle II encourageait d’ailleurs son usage, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’église.  Après son abdication, en 1870, l’usage de la mantille devint largement limité aux occasions formelles et à la messe.  Étrangement, l’obligation, pour les femmes, de se couvrir la tête à l’église ne fut introduit, dans le droit canon, qu’en 1917.  Jusqu’en 1983, l’Église catholique exigeait que les femmes se couvrent la tête en entrant dans une église.  Avant 1917, une telle loi n’existait pas, même s’il était d’usage pour les femmes de se couvrir la tête.





Bien que l’usage du voile et des écharpes ait grandement diminué, certaines dénominations chrétiennes l’imposent encore.  Durant près de 2000 ans, les femmes orthodoxes, fussent-elles grecques, serbes, russes, égyptiennes ou syriennes, sont allées à l’église la tête couverte.  L’Église orthodoxe universelle impose un code vestimentaire visant à éviter les distractions durant la prière.  En Albanie, les chrétiennes portent souvent de grands voiles blancs et dans les bâtiments de l’Église orthodoxe albanaise, les femmes sont séparées des hommes par des cloisons en treillis.  Enfin, chez plusieurs petites dénominations protestantes, les femmes se couvrent la tête.  On pense, ici, aux Amish, aux Mennonites et aux Huttérites, entre autres.  Dans ces dénominations protestantes, même s’il n’y a pas de texte officiel imposant de se couvrir la tête, plusieurs femmes décident de le faire sur la base de leur compréhension de 1Corinthiens 11.  Par ailleurs, certaines catholiques choisissent de se couvrir la tête pour imiter la Vierge Marie.  Cette dernière couvrait ses cheveux par respect pour la coutume juive de l’époque et nous jetterons un coup d’œil aux coutumes vestimentaires judaïques dans le prochain article.





Les juives d’aujourd’hui qui couvrent leurs cheveux le font pour différentes raisons.  Pour certaines, c’est un signe qu’elles sont mariées, pour d’autres, il s’agit d’un symbole de piété et d’humilité ou encore un acte de soumission à la volonté de Dieu.  À l’époque biblique, au Moyen-Orient et dans les anciens empires grec et romain, il était de coutume de se couvrir les cheveux, du moins chez les femmes mariées, respectables et libres.  L’Ancien Testament (Torah) n’en fait mention que de façon brève, mais ces quelques mots se sont transformés, avec le temps, en un rituel complexe pratiqué par des juives pieuses partout à travers le globe.





L’affirmation selon laquelle se couvrir les cheveux serait une injonction biblique provient d’un court passage dans le livre des Nombres, qui fait référence à un prêtre découvrant les cheveux d’une femme en signe de châtiment ou d’humiliation.  Ce passage décrit une cérémonie visant à tester la fidélité d’une femme accusée d’adultère.  Selon la Torah, le prêtre découvre les cheveux (ou défait les tresses) d’une femme accusée d’adultère afin de l’humilier avant que ne commence la cérémonie comme telle (Nombres 5:18).





Par ailleurs, certains passages du Talmud ordonnent aux femmes juives de couvrir leurs cheveux.  Selon ces écritures, une femme qui sort les cheveux découverts se rend coupable d’un acte si inacceptable qu’il constitue une raison de divorce valable.  Dans une société aussi consciente de la sexualité et de ses dangers, le voile était considéré comme une nécessité absolue pour maintenir la modestie et la chasteté des femmes comme des hommes.  Certains rabbins considéraient même le fait de montrer ses cheveux comme aussi choquant que de montrer ses parties intimes.  C’est pourquoi les femmes mariées devaient se couvrir les cheveux devant les hommes et plusieurs rabbins interdisaient la récitation des bénédictions en présence d’une femme aux cheveux découverts.





Les lois sur la modestie contenues dans le Talmud visaient à rendre la femme inaccessible et non-disponible à tous les hommes en dehors de son mari.  Lorsque les hommes voyaient une femme avec la tête couverte, ils savaient qu’il s’agissait d’une femme mariée et respectable.  Bien que le voile juif soit un symbole de soumission, il est aussi un signe d’honneur.  Lorsqu’une femme mariée se couvre la tête, c’est le symbole d’une grande dignité. 





Dans le judaïsme de l’époque biblique et postbiblique, le port du voile représentait un cycle de la vie d’une femme, qui passait de la virginité à l’âge adulte.  Au Moyen-Âge, à travers le monde juif, se couvrir les cheveux était une obligation religieuse fermement établie.  Il est intéressant de noter que cette même obligation existait, au même moment, chez les chrétiennes et les musulmanes.





Le premier grand changement dans le domaine fut les perruques, utilisées à la place du foulard.  Cette pratique, qui connut ses débuts dans la cour française, se répandit en Europe et au sein des communautés juives.  Elle fut initialement dénoncée par les autorités juives, qui fulminèrent contre ce qui leur apparaissait comme une imitation inappropriée des non-juifs.  Plusieurs maintinrent que l’interdiction traditionnelle, pour les femmes, de montrer leurs cheveux visait à prévenir l’attraction que ceux-ci pouvaient susciter chez les hommes.  La perruque, selon eux, ne faisait que produire le même effet.  Malgré cela, son usage se répandit rapidement dans les communautés juives et finit par être largement accepté.





Il demeure que de nombreuses juives trouvent difficile de porter la perruque plutôt que le foulard traditionnel.  La perruque a fait un retour en force, au sein de certaines communautés juives, au 20e siècle, alors que des femmes juives se trouvèrent obligées de participer à la vie sociale en dehors de chez elles, tout en préférant ne pas faire de compromis sur leurs devoirs religieux.  Lorsque les pressions extérieures de la vie européenne forcèrent les femmes juives à sortir de chez elles, elles trouvèrent plus pratique de porter une perruque.





Aux 20e et 21e siècles, on remarque un mépris de plus en plus répandu envers le fait de se couvrir les cheveux.  Cependant, les juives plus pratiquantes continuent de confronter le problème.  Certains rabbins se résignent en se disant que la société a changé et qu’il n’est plus considéré comme immodeste de sortir les cheveux découverts, mais la plupart continuent de considérer cette nouvelle pratique comme problématique.  De nos jours, la majorité des juives ne se couvrent plus la tête, sauf à la synagogue.





Pour les juives et les musulmanes, la modestie est une partie intégrante de leur foi et elle influence plusieurs aspects de leur vie, dont la façon dont elles marchent, dont elles s’habillent et dont elles interagissent avec les autres.  Les deux religions encouragent la modestie d’abord et avant tout pour que la femme garde sa beauté pour elle et ceux qui l’entourent.  Dans les deux religions, le hijab est considéré comme un comportement plutôt que comme un simple foulard, perruque ou voile.  À une époque, jusqu’à il y a à peine 100 ans, la plupart des dénominations chrétiennes considéraient le fait de se couvrir, pour les femmes, comme une partie intégrante de leurs croyances religieuses.  Au 21e siècle, cette pratique ne s’applique plus qu’à une poignée de dénominations.  Pourtant, jusqu’à un certain point, le christianisme et le judaïsme considèrent toujours l’habillement et le comportement modestes comme une norme



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