Mahomet. Et cet homme a dit la même chose que Moïse, Jésus, et tous les autres prophètes : il n’y a qu’Un Dieu. C’était le message de l’Islam. L’Islam est la vraie religion. Plus les gens liront et deviendront intelligents, plus ils se familiariseront avec la logique et le raisonnement. Ils abandonneront les idoles ou les rituels qui supportent le polythéisme, et ils reconnaîtront qu’il n’y a qu’Un Dieu. Et par conséquent, j’espère que le moment ne tardera pas où l’Islam prédominera dans le monde. »1
C’est également sur l’île de Saint Hélène qu’il affirmera : « Jésus se dit le Fils de Dieu et il descend de David ! J’aime mieux la religion de Mahomet, elle est moins ridicule que la nôtre »2, ou encore : « La religion de Mahomet est la plus belle »3
1 Correspondance de Napoléon 1er- Journal inédit de Sainte Hélène, de 1815 à 1818 (Général Gourgaud), Napoléon Bonaparte, éditions Comon et cie, 1847, tome 5, p. 518.
2 Journal de Sainte-Hélène 1815-1818 (Gourgaud), Napoléon Bonaparte, éd. Flammarion, 1944, 1817, tome 2, p. 226.
3 Journal de Sainte-Hélène 1815-1818 (Gourgaud), Napoléon Bonaparte, éd. Flammarion, 1944, 1817, tome 1, p. 312.
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Des musulmans qui ont affiché leur fierté
L’histoire regorge de récits de croyants qui ont fièrement proclamé et affiché leur islamité et leur dignité de musulman.
L’un des tout premiers et des plus connus fut ‘Oumar qui, au péril de sa vie, annonça publiquement sa conversion à l’islam à la Mecque. Ibn Hichâm relate, dans sa biographie du Prophète , que lorsqu’il embrassa l’islam, ‘Oumar alla trouver Jamîl ibn Ma’mar Al-Joumahi, qui était alors le plus grand colporteur de nouvelles de Qouraych, afin de lui annoncer sa conversion. Jamîl, de sa voix la plus forte, annonça alors que ‘Oumar avait renié sa religion. ‘Oumar , qui se trouvait derrière lui, s’exclama : « Il ment, j’ai simplement embrassé l’islam. » Les Mecquois accoururent alors et agressèrent ‘Oumar qui se défendit vaillamment. »1
La conversion de ‘Oumar à l’islam modifie le rapport de force entre musulmans et mécréants à la Mecque. ‘Abdoullah ibn Mas’oûd relate : « Nous n’avons cessé de gagner en puissance depuis le jour où ‘Oumar a embrassé l’islam. »2 Avant sa conversion, les musulmans ne pouvaient pas même prier à proximité de la Kaaba. Ibn Mas’oûd affirme : « Nous ne pouvions pas prier près de la Kaaba, jusqu’au jour où ‘Oumar embrassa l’islam. » Car après avoir refusé de dissimuler sa conversion comme le firent, contraints et forcés, la majeure partie des premiers musulmans, ‘Oumar refuse de se cacher pour prier à l’image de ses coreligionnaires. Il nous fait lui-même ici le récit de ces bouleversements : Après avoir embrassé l’islam, je dis au Prophète : « Messager d’Allah ! Ne suivons-nous pas le droit chemin, que nous mourrions ou que nous restions en
1 Ibn Hichâm (1/348-349).
2 Rapporté par Al-Boukhâri (3863).
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vie ? » « Si, par Celui qui tient mon âme dans Sa Main, vous suivez le droit chemin, que vous mourriez ou que nous restiez en vie », répondit-il. Je dis : « Alors pourquoi nous cacher ? Par Celui qui t’a envoyé aux hommes avec la vérité, nous allons sortir devant eux. » Nous sortîmes donc en formant deux colonnes, Hamzah dans l’une d’elles, et moi dans l’autre. Nous nous dirigeâmes alors vers la Mosquée, nos pas produisant le bruit du grain concassé par la meule. Une fois à l’intérieur, remarquant ma présence et celle de Hamzah, les Qouraychites furent plongés dans une affliction sans pareille. C’est ce jour-là que le Messager d’Allah m’a donné le surnom d’Al-Fâroûq1.
Devenu second calife de l’islam, ‘Oumar lance les troupes musulmanes vers l’Irak dans le but de conquérir l’empire perse. Avant la bataille décisive d’Al-Qâdisiyyah et, à la demande de Rostoum - chef de l’armée perse -, Sa'd ibn Abi Waqqâs - commandant de l’armée musulmane - lui envoya un messager nommé Rib’i ibn ‘Âmir qui, devant le général en chef des troupes perses afficha une fierté qui déconcerta ce dernier.
Rib’i pénétra sous la tente de Rostoum qui avait été décorée de coussins cousus d’or, de tapis en soie, de pierres et de perles précieuses. Là, se tenait Rostoum, entouré de tout son faste, assis sur un trône en or, et portant sa couronne. Rib’i, quant à lui, portait des vêtements en tissu grossier, un sabre, un bouclier et montait un cheval court dont il ne descendit pas avant d’avoir foulé le bord des tapis de soie. Puis il mit pied à terre et attacha sa monture aux coussins. Portant toujours ses armes, revêtu de son armure et encore coiffé de son casque, Rib’i se dirigea vers Rostoum. Les Perses lui demandèrent alors de déposer ses armes, mais Rib’i rétorqua : « Je ne suis venu qu’en réponse à votre invitation. Aussi, soit vous me
1 C’est-à-dire, celui qui discerne le vrai du faux.
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permettez de conserver mes armes, soit je repars. »
Rostoum leur ordonna alors de le laisser s’approcher de lui en armes. Puis ils l’interrogèrent en ces termes : « Dans quel but êtes-vous venus ? » Rib’i répondit : « Allah nous a envoyés afin d’arracher au culte des créatures celui qu’Il voudra et le guider vers l’adoration du Créateur, de l’arracher à la misère et lui apporter la félicité, à l’injustice des religions pour la remplacer par la justice de l’islam. Il nous a donc envoyés afin de prêcher Sa religion à Ses créatures. Aussi, nous laisserons en paix quiconque acceptera cette religion, et combattrons quiconque la rejetteras jusqu’à atteindre ce qu’Allah nous a promis. » Ils demandèrent : « Et quelle est cette promesse d’Allah ? » Il répondit : « Le Paradis, réservé à quiconque mourra en combattant celui qui aura rejeté l’islam ou la victoire promise à celui qui restera en vie. » Rostoum dit : « J’ai entendu ce que vous aviez à dire. Pouvez-vous nous accorder un sursis afin que nous y réfléchissions ? » Rib’i répondit : « Oui, quel délai désirez-vous? Un ou deux jours ? » Mais Rostoum répondit : « Non, le temps d’envoyer des messages à nos chefs et d’obtenir leur réponse. » Rib’i répliqua : « Le Messager d’Allah ne nous a pas prescrit d’accorder un délai supérieur à trois jours à l’ennemi que nous rencontrons. Aussi, réfléchis à votre situation et prends ta décision à l’expiration de ce délai. » Rostoum demanda alors à Rib’i : « Es-tu leur chef ? » « Non, répondit-il, mais les musulmans sont à l’image d’un seul corps, la protection accordée par le plus faible d’entre eux est respectée par le plus puissant. »1
Quatre siècles plus tard, c’est face à l’empereur byzantin en personne qu’un musulman affichera sa fierté. Le musulman en question est le théologien Abou Bakr Al-Bâqillâni, envoyé à l’empereur byzantin par l’un des princes de la dynastie des Bouyides
1 Târîkh At-Tabari (3/519-521).
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avec pour mission de lui remettre un message et de lui montrer la force de l’islam et les contradictions du christianisme.
Al-Bâqillâni relate lui-même sa rencontre avec l’empereur byzantin :
Après avoir quitté l’Irak, nous pénétrâmes en terres byzantines avant d’atteindre Constantinople où séjournait l’empereur byzantin. Informé de notre arrivée, l’empereur envoya un homme à notre rencontre qui nous avertit : « N’entrez pas chez l’empereur avec vos turbans sur la tête - sauf s’il sont faits d’un tissu fin - et avec vos sandales en cuir aux pieds. »
Je rétorquai : « Je n’en ferai rien ! Je n’entrerai qu’en portant ces vêtements. Soit vous l’acceptez, soit je vous remettrai le message que vous lirez, puis vous me ferez parvenir votre réponse avec laquelle je repartirai. »
Informé, l’empereur dit : « Je veux connaître les raisons de ce refus de se plier aux usages que j’impose habituellement aux messagers. »
Al-Bâqillâni répondit en disant : « Je suis l’un des savants musulmans. Et ce que vous attendez de nous est une humiliation et un rabaissement. Or, Allah le Très Haut nous a élevés par l’islam et nous a honorés par notre prophète Mouhammad, paix et bénédiction d’Allah sur lui. En outre, les rois ont pour habitude d’honorer les messagers que leur envoient les autres souverains, non de les rabaisser volontairement. Surtout si le messager en question est un érudit. Car le rabaisser revient à abaisser son rang auprès d’Allah et des musulmans. Si j’agissais comme ils me le demandent, les musulmans me le reprocheraient et douteraient de mon attachement à la religion. J’en serais alors rabaissé à leurs yeux. Aussi, s’il veut me voir entrer, alors j’entrerai comme j’entre chez le calife. Et si cela lui répugne, alors qu’il lise le message dont nous
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sommes porteurs et qu’il y réponde, sans qu’une rencontre ne soit nécessaire. Puis qu’il nous laisse repartir chez celui qui nous a envoyés ici.
Informé de sa réponse, l’empereur ordonna : « Laissez-le entrer, ainsi que ceux qui l’accompagnent, comme ils le désirent. » Mais l’empereur sut qu’Al-Bâqillâni ne se prosternerait pas devant lui, contrairement aux gens qui ont l’habitude d’embrasser le sol aux pieds de leurs rois. Il employa donc une ruse afin d’obliger Al-Bâqillâni à se rabaisser devant lui. Il fit placer son trône devant une porte basse par laquelle seul un homme incliné pouvait entrer, afin de contraindre Al-Bâqillâni à se présenter à lui dans cette position, de manière à compenser son refus de se prosterner et d’embrasser la terre à ses pieds.
Lorsque l’empereur eut pris place sur son trône, il ordonna que l’on fasse entrer Al-Bâqillâni par cette porte. Mais en voyant la porte, Al-Bâqillâni comprit qu’il y avait là une ruse. Il courba donc son dos, baissa la tête en s’inclinant, et entra à reculons tournant donc le dos à l’empereur devant lequel il se présenta dans cette position. Puis il releva la tête, redressa le dos, et fit face à l’empereur. Ce dernier fut impressionné par sa sagacité et éprouva un profond respect pour Al-Bâqillâni1.
Plus proche de nous, un musulman a affiché fièrement son attachement à l’islam et ses coutumes en un lieu qui en surprendra plus d’un : le Parlement français. Le musulman en question est Philippe Grenier, fils d’Hippolyte Grenier, capitaine de cavalerie et membre de l’état-major de Napoléon III. Diplômé de la faculté de médecine de Paris en 1890, il rend visite la même année à son frère cadet à Blida, en Algérie française, ce qui marquera le début de sa révélation pour la culture musulmane. De retour en métropole, il se
1 Voir Târîkh Baghdâd (5/379) et Al-Bidâyah wa An-Nihâyah (11/350).
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met à étudier le Coran et s’informe longuement sur cette religion qu’il sent correspondre à son état d’âme. Quatre ans plus tard, en 1894, lors d’un second voyage à Blida, il se convertit à l’islam. Il a vingt-neuf ans et rentre à Pontarlier, sa ville natale, pour servir autant les pauvres que ses coreligionnaires. Il décide d’afficher sa conversion et s’habille désormais comme les musulmans d’Algérie.
Il se fait tout d’abord élire conseiller municipal de sa ville, puis tente sa chance aux élections législatives. Menant une campagne électorale modeste, il devient la risée de la presse qui se moque de ses « exubérances vestimentaires ». Son programme social ambitieux pour l’époque lui permet tout de même d’être élu de justesse au second tour avec 51 % des voix. Créant un véritable coup de théâtre électoral, il devient le premier député musulman de l’histoire de France et siège, de 1896 à 1898, à l’assemblée nationale où il se présente en bottes marocaines, gandoura, burnous et turban.
Le 30 décembre 1896, en présence de plusieurs journalistes qui l’interrogent après sa victoire, il s’explique sur sa foi. « Vous voulez savoir pourquoi je me suis fait musulman ? Par goût, par penchant, par croyance, et nullement par fantaisie, comme quelques-uns l’ont insinué. Dès mon jeune âge, l’islamisme et sa doctrine ont exercé sur moi une attraction presque irréversible […] Mais ce n’est qu’après une lecture attentive du Coran, suivie d’études approfondies et de longues méditations, que j’ai embrassé la religion musulmane. J’ai adopté cette foi, ce dogme, parce qu’ils m’ont semblé tout aussi rationnels et en tout cas plus conformes à la science que ne le sont la foi et le dogme catholiques. J’ajoute que les prescriptions de la loi musulmane sont excellentes puisqu’au point de vue social, la société arabe est basée tout entière sur l’organisation de la famille et que les principes d’équité, de justice, de charité envers les malheureux y sont seuls en honneur, et qu’au point de vue de l’hygiène - ce qui a bien quelque importance pour un médecin -, elle proscrit l’usage des
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boissons alcooliques et ordonne les ablutions fréquentes du corps et des vêtements. »
Voyez comment Philippe Grenier, malgré les moqueries, défendit sa religion face à la presse et n’eut pas honte de porter à l’assemblé burnous et turban, alors que certains musulmans ont honte aujourd’hui, en France, de porter simplement un prénom musulman !
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Les musulmans et le terrorisme
L’une des raisons qui poussent une partie des musulmans à ne pas afficher leur islam, voire à la dissimuler, est probablement le comportement de certains de leurs coreligionnaires, en particulier ceux qui, au nom de l’islam, tuent des vies innocentes.
Mais les musulmans ne sont en réalité aucunement responsables de ces crimes pour lesquels ils n’ont nullement à s’excuser.
Faut-il que chaque fois qu’un musulman commette l’irréparable au nom d’une religion dont il ne connaît pas les préceptes les plus élémentaires, les musulmans soient montrés du doigt, sommés de condamner, voire de s’excuser ? Demander aux musulmans de condamner, n’est-ce pas déjà les accuser de complicité ? Pourquoi d’ailleurs condamner un acte qui se condamne de lui-même ?
Exige-t-on des Chinois de France de condamner l’internement et les tortures psychologiques ou physiques infligées, non pas à quelques musulmans, mais à plus d’un million d’entre eux, les ouïghours ?
Exige-t-on des indous de France de condamner les crimes commis contre, non pas quelques musulmans, mais des centaines de milliers de Rohingya par la junte birmane ?
A-t-on exigé des Français qu’ils condamnent les attentats de Churchtown où des dizaines de musulmans sont tombés sous les balles d’un suprémaciste blanc au nom de la supériorité supposée de sa race ?
La France s’est-elle excusée de l’assassinat de milliers d’Algériens, coupables seulement de réclamer leur liberté, pour que les musulmans de France soient tenus de s’excuser de l’assassinat de
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certains de leurs compatriotes ? A moins que le terrorisme d’Etat soit plus légitime que celui des individus ?
La France s’est-elle excusée de la réduction en esclavages de millions d’Africains, dont des centaines de milliers sont morts en raison de mauvais traitements, pour que les musulmans de France soient sommés de s’excuser d’un crime auquel ils ne sont en rien liés.
Non, les musulmans de France n’ont ni à s’excuser, ni à avoir honte de leur religion. D’autant que l’islam a condamné plus que toute autre religion les exactions en temps de guerre et l’exécution d’innocents. Le Très Haut dit : « Combattez pour la cause de Dieu ceux qui vous combattent, sans toutefois transgresser. Dieu, en vérité, n’aime pas ceux qui transgressent ses interdits. »1
A ses compagnons qui partaient en campagne, le Prophète adressait ces paroles : « Ne trahissez pas vos pactes, ne mutilez pas l’ennemi et ne tuez pas les enfants. »2
Et il leur faisait ces recommandations : « Ne tuez ni les personnes âgées, ni les enfants, ni les femmes. »3
Ce hadith, comme celui qui précède, démontre que l’islam appelle au respect de tous les individus, même de ceux qui le combattent. Roger du Pasquier écrit à ce sujet : « A l’exemple du Prophète, qui avait imposé aux combattants de l’Islam le respect de l’ennemi vaincu et désarmé, les musulmans, lorsqu’ils durent faire la guerre, s’efforcèrent de la rendre aussi humaine que possible. Leur attitude modérée et tolérante a beaucoup contribué à leur gagner la sympathie des populations dans les pays où leurs armées firent campagne et, dans bien des régions, comme certaines provinces de
1 Sourate Al-Baqarah, verset 190.
2 Rapporté par Mouslim.
3 Rapporté par Abou Dâwoûd.
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l’Empire byzantin, ils furent accueillis en libérateurs. Dans tous les pays conquis, l’Islam a toujours accepté la présence de nombreux et importants groupes professant d’autres religions. Mais en sens inverse, lorsque par exemple les chrétiens eurent reconquis l’Espagne, tous les musulmans furent massacrés, convertis de force ou chassés. »1
Les musulmans mettaient simplement en pratique les paroles du Prophète et celles d’Allah comme celles-ci : « Que votre ressentiment à l’encontre de vos ennemis ne vous pousse pas à les traiter injustement. Soyez au contraire justes. »2
Comme l’explique très justement un document émanant du Secrétariat du Vatican pour les non-chrétiens intitulé Orientations pour un dialogue entre chrétiens et musulmans (1970), « le Jihâd n’est aucunement le kherem biblique, il ne tend pas à l’extermination, mais à étendre à de nouvelles contrées les droits de Dieu et des hommes. » Le document fait notamment référence à ces textes de l’Ancien Testament, d’une violence inouïe, où le Dieu d’Israël appelle les hébreux à exterminer leurs ennemis : « Passez après lui dans la ville, et frappez ; que votre oeil soit sans pitié, et n’ayez point de miséricorde ! Tuez, détruisez les vieillards, les jeunes hommes, les vierges, les enfants et les femmes. »3 Ou : « Leurs enfants seront écrasés sous leurs yeux, leurs maisons seront pillées, et leurs femmes violées. »4
Le document du Vatican décrit le djihad comme un combat permettant d’étendre les droits de Dieu et des hommes à de nouveaux territoires. Il est aussi et surtout, pour les musulmans, un moyen de se défendre comme l’indique clairement un verset qui
1 Découverte de l’islam, 1985, p. 65.
2 Sourate Al-Mâïdah, verset 8.
3 Ezéchiel 9, 5-6.
4 Esaïe 13, 16.
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vient d’être mentionné. Par conséquent, les musulmans sont tenus d’accepter toute proposition de paix : « Si donc ils se tiennent à l’écart et vous offrent la paix, renonçant à vous combattre, Allah ne vous donne plus aucune raison de les inquiéter. »1 Et il invite les musulmans à se montrer bienveillants avec ceux qui s’abstiennent de les combattre : « Allah ne vous défend pas de traiter avec bonté et équité ceux d’entre eux qui ne vous ont ni persécutés en raison de votre foi, ni contraints à l’exil. Allah aime les hommes justes. »2
1 Sourate An-Nisâ’, verset 90.
2 Sourate Al-Moumtahanah, verset 8.
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Le musulman ne doit pas imiter les mécréants
C’est notamment en raison de cette supériorité de l’islam sur les autres religions, et de la fierté que le musulman doit ressentir, qu’il n’est pas autorisé à imiter les mécréants.
Le Prophète a dit : « Quiconque imite des gens est des leurs. »1
L’imitation des mécréants se manifeste avant tout par la manière de s’habiller. Cheikh Al-‘Outhaymîn, qu’Allah lui fasse miséricorde, fut interrogé en ces termes : « Certains musulmans, lorsqu’ils voyagent à l’étranger, sont gênés de porter des vêtements qui indiquent qu’ils sont musulmans Quels sont vos conseils à ce sujet ?
Voici sa réponse : « Malheureusement, ce qu’affirme cette personne est vrai. Bien que nous leur soyons supérieurs, nous manquement de personnalité et les imitons comme des moutons… ».
Mais à quel moment l’imitation des mécréants devient-elle interdite ? Cheikh Al-‘Outhaymîn a répondu à cette question : « L’imitation est interdite lorsque le musulman imite une coutume particulière aux mécréants. En revanche, imiter des coutumes héritées des mécréants, mais qui se sont répandues parmi les musulmans au point que les mécréants ne se distinguent plus par elles des musulmans, n’est pas interdit sauf si ces pratiques sont en soit illicites. C’est d’ailleurs le sens même du mot « Tachabbouh » (imitation, en arabe). Ibn Hajar explique clairement ce point dans Fat’h Al-Bâri où il dit : « Certains de nos pieux prédécesseurs ont
1 Rapporté par Abou Dâwoûd.
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réprouvé le port du burnous, expliquant que les moines portaient ce genre de vêtement. Or, l’imam Malik a été interrogé à ce sujet. Voici sa réponse : « Il n’y a pas de mal à le porter. » On rétorqua : « Mais, il fait partie de l’habillement des chrétiens ! » Il répondit : « Il est aussi porté chez nous. » »
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Le musulman ne doit pas se rabaisser devant eux
Et le musulman n’est pas autorisé à se rabaisser devant les mécréants en raison de la supériorité que lui donne sa foi. Pourtant, certains musulmans vivant en Occident n’hésitent pas à occuper les emplois les plus dégradants - d’autant plus humiliants qu’ils les empêchent parfois d’accomplir leurs prières à l’heure prescrite -, comme les postes d’agent d’entretien, d’agent propreté, de femme de ménage ou encore d’aide-ménagère.
Ibn Hajar, qu’Allah lui fasse miséricorde, rapporte ce commentaire d’Al-Mouhallab au sujet des musulmans qui sont employés par des mécréants : « Les savants de l’islam considèrent qu’il est détestable (Makrouh) que le musulman soit au service d’un mécréant, sauf en cas de nécessité et si deux conditions sont réunies. La première condition est que le travail ne soit pas interdit en soit, et la deuxième est qu’il ne doit pas, par son travail, porter préjudice aux musulmans. » Ibn Hajar, toujours, rapporte ces paroles d’Ibn Al-Mounîr : « Les écoles de jurisprudences affirment que les artisans musulmans sont autorisés à travailler dans leurs ateliers pour les mécréants, puisqu’ils ne se rabaissent pas devant eux en procédant de la sorte, contrairement à ceux, parmi les musulmans, qui sont au service des mécréants dans leurs maisons et se rabaissent en les servant. »1
1 Fat’h Al-Bâri (4/452).
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Le musulman doit-il émigrer en terre d’islam ?
Après avoir montré l’interdiction de se rabaisser devant les mécréants et l’obligation pour le musulman d’afficher fièrement son islam - ce que certains ne font pas en Occident, dissimulant au contraire honteusement leur appartenance à l’islam -, une question se pose naturellement ici : le musulman est-il autorisé à vivre dans un pays non musulman ou doit-il au contraire, pour toutes ces raisons, émigrer en terre d’islam et accomplir son hégire ?
Interrogé sur la manière dont l’islam juge les musulmans qui vivent dans les pays non musulmans, le cheikh Al-‘Outhaymîn, qu’Allah lui miséricorde, a donné une réponse détaillée que chaque musulman est tenu de méditer. Voici donc sa réponse :
Vivre dans les pays non musulmans représente un grand danger pour le musulman : pour sa religion, ses moeurs, son comportement et son éducation. A tel point que nous avons été, avec d’autres, le témoin du dévoiement de nombreuses personnes qui, après avoir séjourné dans ces pays, sont revenues transformées. Certains étaient devenus dévoyés et d’autres avaient renié leur religion, ainsi que toute autre religion, pour devenir des athées qui se moquent de la religion et des croyants parmi nos prédécesseurs et nos contemporains. Il devenait donc urgent de fixer des conditions qui permettent d’éviter ce genre de périls. Deux conditions de base sont donc requises pour celui qui souhaite vivre dans les pays non musulmans.
Première condition : que la religion de celui qui séjourne dans ces pays ne soit pas en danger. Cela implique d’avoir un minimum de science religieuse, une foi suffisamment établie, et une résolution
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suffisamment ferme pour garantir son attachement inébranlable à la religion et le préserver de tout dévoiement et de tout égarement. Et il ne doit pas éprouver d’amour pour les non musulmans. En effet ressentir de l’amour pour eux s’oppose à la foi comme le prouvent les paroles d’Allah : « Tu ne trouveras personne, parmi ceux qui croient en Allah et au Jour dernier, qui témoigne de l’affection à ceux qui s’opposent à Allah et Son Messager, fussent-ils leurs pères, leurs fils, leurs frères ou leurs proches parents. »1
Seconde condition : qu’il lui soit possible de proclamer et d’afficher son islam, c’est-à-dire qu’il puisse pratiquer le culte musulman sans aucune entrave : qu’il s’agisse de la prière du vendredi (si celle-ci est célébrée), des prières en commun (s’il existe une communauté de musulmans), de l’aumône légale (Zakât), du jeûne ou du pèlerinage. S’il lui est interdit de pratiquer un quelconque aspect du culte musulman, il n’a pas le droit de séjourner dans ces pays, et l’émigration vers un pays musulman devient dès lors obligatoire. Ibn Qoudâmah affirme que les musulmans ne sont pas identiques quant à l’obligation ou non d’émigrer : « Elle est obligatoire pour ceux qui sont capables d’émigrer et qui dans le même temps ne peuvent afficher leur religion et accomplir les prescriptions de l’islam au milieu des non musulmans. Ceux-là doivent obligatoirement émigrer comme le prouvent les paroles du Très Haut : « Quant à ceux qui ont été injustes envers eux-mêmes, ils s’entendront dire par les anges chargés de reprendre leurs âmes : « Qu’en était-il de vous ? » « Nous étions impuissants dans notre pays », répondront-ils. Les anges diront : « La terre d’Allah n’était-elle pas assez vaste pour vous permettre d’émigrer ? » Voilà ceux qui n’auront d’autre refuge que la Géhenne. Et quelle horrible demeure ! » »2 Ces terribles menaces prouvent que l’émigration est
1 Sourate Al-Moujâdalah, verset 22.
2 Sourate An-Nisâ’, verset 97.
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obligatoire, car accomplir les devoirs religieux est en soi une obligation. Or ce qui est indispensable à l’accomplissement d’une obligation (les devoirs religieux) est lui aussi obligatoire (l’émigration). »1
Une fois ces deux conditions de base remplies, l’émigration vers les pays non musulmans se divise en plusieurs catégories.
Première catégorie : ceux qui séjournent dans ces pays pour appeler les gens à l’islam. Leur séjour est considéré comme un combat dont doit obligatoirement se charger une partie des musulmans (Fard Kifâyah), ceux qui en ont la capacité. Cependant, l’appel à l’islam doit être réel, il doit rencontrer un certain écho dans la population et ne pas être interdit. En effet, l’appel à l’islam est une obligation religieuse. C’est aussi la voie empruntée par les Messagers. Le Prophète a ordonné à sa nation de transmettre ses enseignements à toutes les époques et en chaque lieu, disant : « Transmettez de ma part ne serait-ce qu’un verset ou un hadith. »
Deuxième catégorie : ceux qui y séjournent avec pour objectif d’étudier et de connaître la situation des mécréants, la corruption de leurs croyances, la vanité de leur culte, la dépravation de leurs moeurs, afin que les gens ne soient pas séduits par eux et pour dévoiler leur réalité à ceux qui les admirent […].
Troisième catégorie : ceux qui y vivent dans l’intérêt des Etats musulmans pour l’établissement de relations diplomatiques avec les pays non musulmans. C’est le cas, par exemple, des employés des ambassades […].
Quatrième catégorie : les musulmans qui y séjournent pour un besoin personnel autorisé comme le commerce ou les soins
1 Al-Moughni, vol. 8, p. 457.
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médicaux. Le séjour dans ces pays est permis jusqu’à satisfaction de ce besoin, il ne l’est plus au-delà. Les hommes de science, qu’Allah leur fasse miséricorde, ont en effet autorisé les voyages vers les pays non musulmans en rapportant cela de certains compagnons, qu’Allah les agrée.
Cinquième catégorie : cette catégorie, qui entre dans la catégorie précédente, est celle des étudiants, sauf que leur séjour est bien plus dangereux pour leur religion et leur morale. En effet, les étudiants, à l’exception de ceux qu’Allah veut protéger, ont tendance à se sentir inférieurs à leurs maîtres qu’ils regardent avec admiration, dont ils adoptent les opinions, les pensées et les comportements, et qu’ils sont tentés d’imiter. Par ailleurs, l’étudiant a toujours le sentiment d’avoir besoin de son maître, ce qui le conduit à vouloir se faire aimer de lui et à le flatter sans tenir compte de sa déviation et de son égarement. En outre, l’étudiant a des camarades de classe dont certains peuvent devenir des amis qu’il aime et qui lui offrent des cadeaux. Compte tenu du danger qu’encourt cette catégorie, il convient de mettre en place des garde-fous supplémentaires. Outre les deux conditions de base citées précédemment, s’y ajoutent ces conditions :
Premièrement, que l’étudiant soit doté d’une grande maturité qui lui permette de faire la différence entre ce qui est utile et ce qui est préjudiciable, et de voir loin dans l’avenir. Quant aux jeunes gens à l’esprit encore faible, c’est mettre en danger leur religion, leur morale et leurs moeurs, que de les envoyer dans ces pays. C’est aussi mettre en danger leur communauté d’origine vers laquelle ils retourneront et dans laquelle ils ne manqueront pas de cracher ce venin qui les a eux-mêmes empoisonnés. Tout ceci est prouvé par l’expérience. En effet, beaucoup d’étudiants envoyés dans ces pays sont revenus différents, dévoyés dans leur religion, leur morale et leur comportement. Eux et leur société d’origine ont alors subi les
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préjudices que tout le monde connaît. Ces étudiants sont comme des brebis que l’on envoie vers des chiens de chasse.
Deuxièmement, il convient que l’étudiant ait suffisamment de connaissance religieuse pour lui permettre de distinguer le vrai du faux, et de combattre le faux par le vrai, afin de ne pas se laisser tromper par leurs fausses croyances. Sinon, il pourrait prendre celles-ci pour des vérités ou bien il serait simplement incapable de les rejeter. Il resterait ainsi dans l’incertitude ou pire encore il serait tenté d’y adhérer. D’où l’importance de cette invocation : « Ô Allah ! Montre-moi le vrai dans sa réalité et accorde-moi d’y adhérer et montre-moi le faux dans sa réalité et accorde-moi de m’en éloigner. Et ne rends pas ce dernier ambigu à mes yeux, provoquant ainsi mon égarement. »
Troisièmement, l’étudiant doit avoir suffisamment de religion pour le préserver de l’incroyance et de l’immoralité. Celui dont la foi est faible n’est pas à l’abri du danger - sauf si Allah le veut - compte tenu de la violence des attaques et de la faiblesse de ses protections. Les raisons qui poussent les gens à devenir mécréants et immoraux sont en effet nombreuses et diverses dans ces pays. Lorsqu’elles trouvent un terreau favorable à leur développement chez un être à l’immunité défaillante, elles agissent sur lui.
Quatrièmement, cette connaissance que l’étudiant veut acquérir doit être utile aux musulmans qui ont besoin de ces sciences qui ne sont pas enseignées chez eux. Si, au contraire, il s’agit de sciences sans intérêt pour les musulmans ou encore si elles sont au programme des universités des pays musulmans, alors il devient interdit de se rendre dans les pays non musulmans pour les étudier là-bas compte tenu des dangers encourus au niveau religieux et moral et de l’énorme gaspillage d’argent que cela implique.
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Sixième catégorie : ceux qui y vivent en permanence. Ceux-là encourent un danger plus grand que les étudiants puisqu’ils sont en contact permanant avec les mécréants dont ils sont les compatriotes avec ce que cela implique comme amour et amitié, sans compter que leur présence augmente la population de ces pays. Leurs familles sont élevées au milieu des mécréants dont elles imitent le comportement et les coutumes, voire les croyances et le culte. C’est pourquoi le Prophète a dit : « Ceux qui se rassemblent avec les polythéistes et vivent avec eux sont comme eux. » Ce hadith, bien que sa chaîne de narrateur soit faible, est très juste, car habiter avec des gens pousse à leur ressembler.
En outre, Qays ibn Abi Hâzim rapporte ces paroles du Prophète : « Je désavoue tout musulman vivant au milieu des polythéistes. »1
1 Rapporté par Abou Dâwoûd et At-Tirmidhi.
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Conclusion
La montée de l’islamophobie - en France en particulier - ne doit pas dissuader les musulmans de proclamer fièrement leur appartenance à l’islam. Les épreuves qu’ils subissent et que leur Prophète a annoncées il y a plus de quatorze siècles doivent, au contraire, les encourager à rester fermement attachés à leur religion. Le Messager d’Allah a dit en effet : « Il viendra un temps où celui, parmi les musulmans, qui s’attachera à sa religion sera aussi éprouvé que celui qui tient une braise dans la main. »
Et que l’on ne soit donc pas étonné de voir l’islam combattu aujourd’hui comme nulle autre confession par les ennemis de la religion. Le Très Haut dit : « C’est lui qui a envoyé son Messager avec une révélation à même d’assurer le salut de l’humanité et la vraie religion pour la faire triompher de tout autre culte, n’en déplaise aux idolâtres. »1
Celui qui n’est pas en mesure d’afficher sa religion en Occident, et plus encore, celui qui est incapable d’y pratiquer sa religion, est donc tenu d’émigrer en terre d’islam où il pourra proclamer fièrement sa foi et obéir sereinement à son Seigneur, en se souvenant que la terre d’Allah est suffisamment vaste et que « quiconque émigre par obéissance à Allah trouvera sur terre d’innombrables refuges et d’abondantes richesses »2.