Née d'une mère musulmane mariée à un chrétien, elle s'interroge sur le statut de ses relations avec son père et avec ses sœurs non musulmanes

Question

Je suis une fille musulmane vivant en Occident. Malheureusement, ma mère a épousé un chrétien (mon père) devant un tribunal civil et ils ont vécu ensemble pendant 20 ans et fait sept enfants dont moi-même. Ensuite, ils se sont séparés-Allah soit loué. Notre famille nous a donné le choix de la religion que nous voulons adopté une fois majeurs. C'est ainsi - Allah soit loué- que certaines de mes sœurs se sont converties à l'islam tandis que deux autres se sont converties au christianisme et se sont fait baptisées après leur atteinte de la majorité. Puis elles ses sont mariées avec des chrétiens. Je n'ai pas assisté à leurs cérémonies de mariage et je n'entretiens aucun contact avec elles. C'est parce que je sais que quand la mère est musulmane, ses enfants doivent l'être spontanément. Dès lors, si l'un quelconque des enfants est baptisé après l'âge de la majorité, il doit être considéré comme un apostasié.
Toutefois, ma mère et mes sœurs musulmanes les traitent doucement et recommandent qu'on les aide comme si elles étaient musulmanes. Voilà pourquoi j'espère qu'on me clarifie ce qui suit: comment devrais-je traiter mes sœurs non musulmanes à la lumière du Coran et de la Sunna? Quels sont mes devoir envers mon père non musulman? Est-il permis de solliciter l'aide de mes sœurs chrétiennes?

Texte de la réponse

En rapport

Louange à Allah.

Louanges à Allah

Premièrement, le fait pour une musulmane d'épouser un mécréant est interdit sans aucune contestation au sein des musulmans. C'est l'un des péchés majeurs qui suscitent la colère de Celui qui connait les mystères. Allah Très-haut: Et ne donnez pas d'épouses aux associateurs tant qu'ils n'auront pas la foi, et certes, un esclave croyant vaut mieux qu'un associateur même s'il vous enchante.  (Coran,2:221) Le Très-haut dit encore: Ô vous qui avez cru! Quand les croyantes viennent à vous en émigrées, éprouvez-les; Allah connaît mieux leur foi; si vous constatez qu'elles sont croyantes, ne les renvoyez pas aux mécréants. Elles ne sont pas licites (en tant qu'épouses) pour eux, et eux non plus ne sont pas licites (en tant qu'époux) pour elles. (Coran,60:10). Le contrat établissant un tel mariage est nul. Celui qui le contractetout en en connaissant l'illégalitédevient incontestablement mécréant. Se référer à propos du statut de cette question à la fatwa n° 170862.

Deuxièmement, les jurisconsultes ont précisé que l'enfant adopte la religion de celui de ses père et mère qui suit la meilleure religion. Ceci se conçoit dans certains cas : quand un musulman épouse une chrétienne, l'enfant est jugé musulman. Il en relève ce dont parle l'érudit hanafite Ibn al-Abidineen ces termes: L'enfant suit celui de ses père et mère qui possède la meilleure religion. Ceci se conçoit des deux côtés quand l'adoption de l'islam survient après qu'ils avaient été mécréants. Si, dans ce cas, l'époux se convertitou sil'épouse se convertila première et fait un enfant avant la conversion de l'autre.. Extrait de ad-durr al-moukhtar et de Hachiatou Ibn Abidiine (3/196).

On lit dans al-Bahr ar-raaiq charh kanz ad-daqaaiq (2/205): Si l'un de ses père et mère se convertit à l'islam, on le juge musulman, que l'enfant soit tout jeune ou capable de discernement car l'enfant doit adopter la religion de celui ou cellede ses père et mère qui suit la meilleure religion.

Si jamais une musulmane épouse un mécréant, son mariage, bien que nul, n'en entraîne pas moins l'appartenance à l'islam des enfants comme leur mère. On lit dans Badaai as-sanai fii tartib ach-charai (7/139): Si un apostasié épousait une musulmane et avait un enfant avec elle ou si un non musulman couvrait une esclave musulmane et si elle faisait un enfant, celui serait jugé musulman et hériterait de son père étant donné la confirmation de la filiation. Si la mère était une mécréante, l'enfant ne serait pas jugé musulman car l'un des parents n'est pas musulman.

Troisièmement, s'il arrivait qu'une musulmane épouse un mécréant, si le couple croit le mariage valide parce qu'ils ignorent son interdiction dans la loi d'Allah, il en résulte une filiation juste à cause de l'ambigüité qui résulte de leur croyance de la validité dumariage. S'ils savent le mariage interdit, il n'en résultera pas une filiation légale.

Ibn Qoudama (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit: Si un homme épouse une femme en délai de viduité alors que l'un et l'autre sont conscientsde l'état de viduité et de l'interdiction du mariage qu'il implique et s'ils entretiennent un rapport intime, ils sont tous les deux coupables d'adultère et doivent en subir la peine. La femme n'aura pas de dot et la filiation de l'enfant qui en naîtrait ne serait pas établieen faveur de l'adultérin. S'ils ignoraient l'état de viduité ou l'interdiction du mariage qui l'accompagne, la filiation de l'enfant serait établie en faveur de l'adultérin et la peine serait supprimée et une dote versée (à la femme). Si elle seule savait (la réalité des choses), elle serait passible de la peine et ne recevrait pas de dot et la filiation de l'enfant serait établie en faveur de l'adultérin. Il n'en est ainsi que parce qu'il s'agit d'un mariage jugé unanimement nul et assimilable au mariage incestueux. Extrait d'al-Moughni (8/127). Voir Kasef al-quinaa (13/44) édition du ministère et Matalibou ouli an-Nouha (5/579).

Cheikh al-islam, Ibn Taymiya, (Puisse Allah Très-haut lui accorder Sa miséricorde) a été interrogé en ces termes à propos d'un homme ayant répudié sa femme trois fois et reçu l'avis d'un mufti selon lequel la répudiation n'est pas effectif, avis dont l'application de la part du mari l'a amené à avoir un rapport avec la répudiée d'où la naissance d'un enfant qualifié de bâtard?

Voici sa réponse:

L'auteur d'un tel avis beigne dans la plus grande ignorance, dans une aberration totale et une opposition à Allah et à Son Messager. Car tous les musulmans sont d'avis que l'enfant issu d'un mariage jugé valide par le mari lui est affilié et qu'ils héritent l'un de l'autre de l'avis unanime desmusulmans, même si ledit mariage était en réalité nul selon l'avis de tous les musulmans; que le mari soit mécréant ou musulman.

Si un juif épousait sa nièce et faisait un enfant avec elle, on le lui affilierait et il hériterait de lui, à l'avis de tous les musulmans, bien que le mariage soit jugé nul de l'avis unanime des musulmans.» Voir le reste de la fatwa dans Madjmou al-fatwa (34/13) et suivants.

Abou Hanifa a choisi l'établissement de la filiation dans un sens absolu, même si les deux partenaires savaient leur mariage interdit, compte tenu de l'existence formelle du mariage, contrairement à l'avis de ses deux compagnons. Voir al-Mabsout d'as-Sarakhsi (17/133), ahkaam adh-dhimmiyiin wal-moustamanii fii darilislam par Dr. AbdoulKarim Zaydan (291-292).

Quatrièmement, ce qui précède permet de savoir que vos deux sœurs converties au christianisme et baptisées comme telles se sont donc apostasiées. Or, il n'est pas permis d'entretenir des liens d'affection avec un apostat. Il faut plutôt lui vouer la haine et les désavouer, compte tenu de la parole du Très-haut: Tu n'en trouveras pas, parmi les gens qui croient en Allah et au Jour dernier, qui prennent pour amis ceux qui s'opposent à Allah et à Son Messager, fussent-ils leurs pères, leurs fils, leurs frères ou les gens de leur tribu. Il a prescrit la foi dans leurs cœurs et Il les a aidés de Son secours.  (Coran,58:22). Evoquant la situation de Noé avec son fils, le Très-haut dit: Et Noé invoqua son Seigneur et dit: "Ô mon Seigneur, certes mon fils est de ma famille et Ta promesse est vérité. Tu es le plus juste des juges". Il dit: "Ô Noé, il n'est pas de ta famille car il a commis un acte infâme. Ne me demande pas ce dont tu n'as aucune connaissance. Je t'exhorte afin que tu ne sois pas du nombre des ignorants". (Coran,11:45-46). Le Très-haut dit encore parlant d'Abraham (psl): Abraham ne demanda pardon en faveur de son père qu'à cause d'une promesse qu'il lui avait faite. Mais, dès qu'il lui apparut clairement qu'il était un ennemi d'Allah, il le désavoua. Abraham était certes plein de sollicitude et indulgent. (Coran,9:114).

Il vous est toutefois permis de lui réserver un bon traitement dans le but de lui inspirer le désir de renouer avec l'islam, à condition que vous soyez sûr d'être à l'abri de toute tentative visant à vous faire pencher de leur côté et d'être affecté par leur fausse propagande.

On lit dans la fatwa de la Commission permanente (1-2/67): Il n'est pas permis de nourrir de l'affection envers les mécréants ni de les fréquenter de manière à s'exposer à la tentation. Cependant, on peutmanger avec eux, les fréquenteret leur réserver un bon traitement pour leur faire désirer l'islam. Cela ne représente aucun inconvénient, si toutefois on reste à l'abri de leur tentation et s'abstientde nourrir de l'affection envers eux. Voir la réponse donnée à la question n° 169985 et la réponse donnée à la question n° 115165.

Cinquièmement, s'agissant en particulier de votre père, votre devoir est de lui assurer un bon accompagnement. A ce propos, Allah Très-haut et Béni dit: Nous avons commandé à l'homme (la bienfaisance envers) ses père et mère; sa mère l'a porté (subissant pour lui) peine sur peine: son sevrage a lieu à deux ans. "Sois reconnaissant envers Moi ainsi qu'envers tes parents. Vers Moi est la destination Et si tous deux te forcent à M'associer ce dont tu n'as aucune connaissance, alors ne leur obéis pas; mais reste avec eux ici-bas de façon convenable. Et suis le sentier de celui qui se tourne vers Moi. 

Ibn Kathir (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit:« C'est-à-dire même s'ils manifestaient le plus ardent désir pour que tu les suives dans leur religion, ne le leur accorde pas. Mais que cela ne vous empêche de leur assurer un bon accompagnement ici bas. C'est-à-dire traitez les bien. Et suis le sentier de celui qui se tourne vers Moi.  C'est-à-dire les croyants.» Extrait du Tafsir d'Ibn Kathir (6/337).

L'une des preuve de la permission de faire preuve de piété filiale à l'égard du père mécréant réside dans ce qui a été rapporté d'Asmaa fille d'Abou Baker (P.A.a) qui dit: Ma mère , encore idolâtre, vint me voir du vivant du Messager d'Allah (Bénédiction et salut soient sur lui). Je sollicitai l'avis de ce dernier en lui disant que ma mère était venue me solliciter et je voulais savoir si je pouvais l'aider. Il dit: oui, fais du bien à ta mère. (Rapporté par al-Bokhari , 2477 et par Mouslim,1003. Faites de votre mieux pour l'inviter à l'islam en lui adoucissant le cœur. Voir la réponse donnée à la question n° 95588 et la réponse donnée à la question n° 27196.

Sixièmement, solliciter l'aide d'un mécréant, qu'il soit un proche ou pas, fait l'objet d'un détail. Si on ne craint pas de se laisser attirer par lui et de nourrir une affection à son égard, il n' y a aucun inconvénient à le solliciter et accepter son aide. Si , en revanche, on risque de pencher verslui et de s'exposer à la tentation des fausses croyances qui l'animent, il n'est permis ni de solliciter ni d'accepter l'aide d'un tel parent. Qu'on cherche plutôt l'aide de ses frères musulmans.

Cheikh Abdoul Aziz ibn Baz (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde)a été interrogé en ces termes: Comment juger le fait de solliciter et d'accepterl'aide des mécréants?

Réponse: la question doit être examinée de façon détaillée. Si la demande et l'acceptation de leur aide ne font pas craindre un préjudice religieux pour celui qui les initie, il n' y a aucun inconvénient à le faire. Si, en revanche, la demande expose le demandeur à un danger, il n'est permis ni de laformuler ni d'accepter l'aide, compte tenu des arguments religieux affirmant l'obligation de se méfier de tout ce qui est interdit par Allah et de s'éloigner de tout ce qui suscite Son dépit.

Il a été rapporté de façon sûre que le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) accepta des cadeaux venus de certains idolâtres mais pas de tous pour la raison déjà évoquée, d'après ce que les ulémas ont précisé.

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