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Cheikh ‘Abd al-Rahmân ibn Ma’lâ al-Luwayhiq, dans sa thèse intitulée Al-ghulû fî al-dîn, a bien défini le sens réel de l’exagération en matière religieuse, en expliquant ses contours et ses limites, et l’a divisée en différentes catégories, comme suit :





Premièrement : l’exagération en matière religieuse dans les textes religieux :


1- L’exagération en matière religieuse consiste à s’imposer à soi-même ou à autrui des actes de dévotion et un ascétisme qu’Allah, exalté soit-Il, n’a pas prescrits. Pour jauger cette exagération, la référence est la capacité de l’homme, c'est-à-dire que tout ce qui dépasse cette dernière dans l’accomplissement d’un acte de dévotion prescrit est considéré comme une exagération en matière religieuse. Les preuves abondent à ce propos :





a- Anas ibn Mâlik, qu’Allah soit satisfait de lui, rapporta ce qui suit : « Un jour, le Prophète () entra dans la mosquée et trouva une corde, accrochée entre deux poteaux. Il demanda : 'Quelle est cette corde ?'. 'C’est une corde appartenant à Zaynab, lui répondit-on, qu’elle utilise pour faire la prière. Quand elle se fatigue, elle s’y accroche'. Le Prophète () dit alors : 'Non ! Détachez-la. Priez tant que vous le pouvez et si vous vous fatiguez, allez-vous reposer' ».





Ibn Hadjar commenta : « Ce hadith incite à observer le juste milieu par rapport aux actes d’adoration et interdit tout excès ».





b- Dans ce même contexte s’inscrit l’interdiction des bonnes choses qu’Allah, exalté soit-Il, nous a rendu licites ou les besoins indispensables, en prétextant l’adoration d’Allah, comme dans l’exemple des trois jeunes gens. Anas ibn Mâlik, qu’Allah soit satisfait de lui, rapporta que trois hommes se rendirent chez les femmes du Prophète () pour les interroger sur la façon dont le Prophète () adorait Allah, exalté soit-Il. Quand elles les en informèrent, cela leur sembla peu. Ils dirent : « Que sommes-nous par rapport au Prophète () alors qu’Allah, exalté soit-Il, lui a déjà pardonné tous ses péchés passés et futur ? ». L’un d’eux dit : « Pour ma part, je passerai toujours mes nuits en prières ». L’autre dit : « Et moi je m’engage à jeûner sans interruption toute ma vie ». Et le troisième de dire : « Moi je m’engage à ne jamais me marier ». Le messager d’Allah () vint alors leur dire :





« Est-ce bien vous qui avez dit ceci et cela ? Par Allah, je suis celui d’entre nous qui craint le plus Allah et qui est le plus pieux. Mais je jeûne et je romps mon jeûne. Je prie une partie de la nuit et ensuite je dors, et je me marie également. Celui qui se détourne de ma Sunna n'est pas des miens ».





De même, si un musulman est contraint de faire une chose illicite pour survivre, comme le fait de consommer de la viande d’une bête interdite ou morte, et qu’y renoncer le conduit à sa perte, alors ce renoncement relève également de l’exagération. Car, Allah, exalté soit-Il, Qui a interdit cela dans l’aisance, l’a permis en cas de contrainte, en disant (sens du verset) :





« Il vous interdit seulement de consommer la bête morte, le sang, la viande de porc et celle de tout autre animal sur lequel on aura invoqué un autre nom que Celui d’Allah. Cependant, si on se trouve contraint d'en consommer par nécessité, et non par insoumission ni désinvolture, on ne commet aucun péché, car Allah est Clément et Miséricordieux » (Coran 2/173).





2- L’exagération en matière religieuse correspond parfois au jugement que l’on porte sur autrui, de telle sorte qu’on loue de façon outrancière certains et qu’on en blâme avec rudesse d’autres, en utilisant des termes impropres du point de vue de la Charia, comme celui d’impie, d’apostat ou autres. Ces deux attitudes engendrent des attitudes qui s’inscrivent dans le cadre de l’exagération, telles que l’amour ou la haine, la loyauté ou l’abandon, etc.





Deuxièmement : L’exagération en matière religieuse consiste au fond en une tendance à appliquer les dispositions de la Charia et les prescriptions divines, mais qui outrepasse les bornes déterminées par le Législateur. Autrement dit, il s’agit d’une exagération dans l’observance des préceptes de la religion, et non pas d’un reniement de ces préceptes, car elle procède de la volonté de s’y conformer.





Troisièmement : L’exagération en matière religieuse consiste non seulement en des actes, mais parfois aussi en le fait de s’abstenir de choses licites. Le fait de s’abstenir de dormir ou de manger, en prétextant des actes de dévotion accomplis pour se rapprocher de son Seigneur, comme font certains soufis ou certains végétariens, constitue une sorte d’exagération en matière religieuse.





Quatrièmement : L’exagération en matière religieuse est soit doctrinale, soit pratique.


L’exagération doctrinale à son tour est soit globale soit doctrinale au sens strict : la première concerne la Charia dans son ensemble et ses questions fondamentales ; la seconde concerne exclusivement les croyances, telle que l’éloge emphatique des imams, les considérant comme infaillibles, ou le désaveu outrancier de la société désobéissante, en traitant ses membres d’apostats et en s’isolant d’eux.





Quant à l’exagération pratique, elle peut également être globale ou partielle.


La première, celle qui est globale, est appelée ainsi du fait qu’elle concerne les infractions à maintes branches de la Charia.





Pour sa part, l’exagération pratique partielle correspond à l’exagération qui concerne une partie de la Charia et une pratique déterminée, et non pas la doctrine. Autrement dit, elle est limitée à la pratique, que ce soit des paroles ou des actions.





En fait, l’exagération globale doctrinale est plus grave que l’exagération pratique, car elle entraîne la division et le schisme, qui caractérisent les groupes égarés du chemin droit, comme les khâridjites et les chiites.





Cinquièmement : L’exagération ne consiste pas à chercher la perfection dans l’ensemble des actes d’adoration, car la détermination de cette perfection est liée à maints facteurs, relatifs à l’œuvre, à celui qui l’accomplit et à ceux qui ont un rapport avec elle.





En analysant l’aumône, par exemple, on prend en considération celui qui s’en acquitte, celui qui la reçoit et l’argent payé à ce titre. En fait, la perfection que le serviteur d’Allah, exalté soit-Il, atteint en se servant des moyens susmentionnés relève toujours de la perfection partielle. Ibn Hadjar, qu'Allah lui fasse miséricorde, a cité Ibn Al-Mounir qui a dit à ce propos : « Il s’agit d’interdire non pas la recherche de la perfection dans l’accomplissement des actes d’adoration, qui est une attitude recommandée, mais plutôt l’exagération qui entraîne la lassitude ou les actes surérogatoires excessifs qui mènent à négliger ce qui est préférable ».





Sixièmement : il est dangereux de juger une action exagérée ou une personne outrancière, car cela est la prérogative des oulémas qui sont conscients des caractéristiques de cette action et qui ont approfondi la science des crédos et leurs branches, car le jugement porté sur une chose doit intervenir après l’avoir bien comprise. Il se peut qu’une chose soit prescrite, mais que, par erreur, son auteur soit taxé d’exagération, de fanatisme, d’intolérance, etc. Voilà pourquoi le critère qui régit le jugement porté sur les actions, les personnes et les groupes, est le Coran et la Sunna, et non pas les passions, les traditions, les coutumes ou la raison, car beaucoup de communautés, de personnes et de groupes ont dévié du bon chemin à ce propos.



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