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Le Coran, qui est l’Écriture religieuse des musulmans, a été révélé en arabe au prophète Mohammed (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui) par l’intermédiaire de l’ange Gabriel.  Cette révélation s’est faite petit à petit, par fragments, sur une période de vingt-trois ans, tant sous la forme de courts versets que sous la forme de longs chapitres (sourates).[1]





Le Coran (litt. « récitation ») est un ouvrage distinct de la sounnah du Prophète qui elle, constitue un recueil (en plusieurs ouvrages) de ses actes et de ses paroles rapportés par ses compagnons (hadiths).





Lorsqu’il recevait la révélation, le Prophète la transmettait directement à ses compagnons en leur récitant fidèlement les mots qu’il avait reçus, et dans le même ordre.  Cela apparaît évident lorsque nous considérons qu’il répétait même les paroles de Dieu qui lui étaient personnellement adressées, comme par exemple « qoul » (qui signifie « dit », à l’impératif comme dans « dit aux gens, ô Mohammed, que…).





Le style et l’éloquence du Coran en font un texte relativement facile à mémoriser.  En fait, Dieu affirme qu’il s’agit là d’une de ses plus grandes qualités, car elle facilite sa préservation et sa mémorisation (Coran 44:58;  54:17, 22, 32, 40), surtout pour une société arabe qui s'enorgueillissait d’une longue tradition de composition et de récitation de poèmes.  Michael Zwettler écrit que :





« À ces époques reculées, alors que l’écriture était à peine utilisée, la mémorisation et la transmission orale étaient pratiquées à un degré qui nous est pratiquement inconnu et étranger, aujourd’hui. »[2]





La révélation était donc facilement mémorisée par une grande partie des gens de la communauté du Prophète.





Le Prophète encourageait ses compagnons à apprendre chaque verset qui lui était révélé et à le transmettre aux autres.  Il leur suggérait également, comme acte d’adoration, de réciter le Coran sur une base régulière, de même qu’au cours des prières.  De cette façon, les musulmans de l’époque entendaient fréquemment les mêmes versets récités à répétition; ils les mémorisaient et les récitaient à leur tour lorsqu’ils faisaient leurs prières.  C’est ainsi que le Coran tout entier fut mémorisé mot pour mot par certains compagnons du Prophète (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui).  Parmi eux, Zaid ibn Thabit, Oubayy ibn Ka’b, Mouadh ibn Jabal, et Abou Zaid.[3]





Non seulement les mots du Coran étaient-ils mémorisés, mais aussi leur prononciation, qui plus tard allait devenir une véritable science appelée « tajwid », la science de la prononciation exacte de chaque lettre et de chaque mot du Coran, en tenant compte également des liaisons et du contexte syntaxique.  Grâce à cette science, de nos jours, de nombreux non-arabophones arrivent à réciter le Coran aussi bien que des arabophones.





Par ailleurs, l’ordre des sourates et des versets du Coran a été agencé par le Prophète lui-même et était bien connu de ses compagnons. [4]  Chaque Ramadan, l’ange Gabriel venait faire réciter le Coran tout entier au Prophète; ce dernier répétait après l’ange, en présence de certains compagnons.[5]  L’année de sa mort, Gabriel le lui fit réciter deux fois en entier.[6]  Ainsi, l’ordre des versets dans chaque sourate, de même que l’ordre des sourates, a également été mémorisé par les compagnons du Prophète (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui).





Plus tard, lorsque certains compagnons allèrent s’installer dans d’autres provinces, ils enseignèrent la récitation du Coran à ces nouvelles populations.[7]  De cette façon, le Coran fut mémorisé par de nombreuses personnes à travers toute l’Arabie, et même au-delà.





En fait, la mémorisation du Coran devint une véritable tradition qui se perpétua à travers les siècles, dans le monde musulman, grâce, entre autres, à l’implantation d’écoles de mémorisation.[8]  Dans ces écoles, les élèves mémorisaient le Coran et apprenaient les règles de tajwid en présence d’un maître qui avait lui-même appris d’un autre maître, de sorte qu’il s’était créé une véritable chaîne d’apprentissage qui remontait jusqu’au Prophète de Dieu lui-même.  Cet apprentissage durait (et dure toujours) de trois à six ans.  Lorsque l’apprentissage est terminé, l’élève reçoit un certificat officiel (ijaza) attestant qu’il maîtrise les règles de récitation et qu’il peut désormais réciter le Coran de la même manière que le récitait le Prophète Mohammed (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui).





L’image ci-dessus représente un certificat typique (ijaza) accordé à la personne qui a terminé l’apprentissage du Coran, certificat qui atteste que cette personne fait partie de la chaîne d’apprentissage remontant au Prophète de l’islam.  Le certificat ci-dessus est celui du qari Mishari bin Rashid al-Afasy, un qari (réciteur) bien connu du Koweit, accordé par le sheikh Ahmad al-Ziyyat.  L’image est une courtoisie de (http://www.alafasy.com.)   





A.T. Welch, un orientaliste non-musulman, écrit :





« Pour les musulmans, le Coran est bien plus qu’une Écriture sacrée comme on l’entend généralement en Occident.  Pour la vaste majorité [des musulmans], à travers les siècles, le Coran, a toujours été avant tout un texte oral, c’est-à-dire la forme sous laquelle il a d’abord été révélé, une « récitation » qu’a psalmodié Mohammed à ses fidèles sur une période de plus de vingt ans…  Les révélations étaient mémorisées par certains compagnons de Mohammed du vivant de ce dernier, et la tradition orale ainsi établie s’est poursuivie, jusqu’à nos jours, de façon plus ou moins indépendante, et peut-être même supérieure au Coran écrit…  À travers les siècles, la tradition orale du Coran a été perpétuée par les réciteurs professionnels (qourra).  Jusqu’à tout récemment, la récitation du Coran a rarement été pleinement appréciée en Occident. »[9]





Le Coran est probablement l’unique livre, parmi les livres religieux et laïques confondus, qui ait été mémorisé en entier par des millions de personnes à travers le monde.[10]  L’orientaliste Kenneth Cragg écrit que :





« … ce phénomène de récitation du Coran signifie que le texte a traversé les siècles en une succession ininterrompue de dévotion.  On ne peut donc le considérer comme une antiquité ni comme un document historique provenant d’un passé lointain.  La récitation a fait du Coran un Livre présent à toutes les époques de l’histoire de l’islam, à chaque génération, et a fait en sorte qu’il ne soit jamais relégué à un simple rôle de référence. » 





Le Coran tout entier a été mis par écrit au fur et à mesure de sa révélation à Mohammed par certains de ses compagnons lettrés, dont le plus connu était Zaid ibn Thabit.[1]   Parmi les autres scribes, il y avait également Oubayy ibn Ka’b, Ibn Mas’oud, Mou’awiyah ibn Abi-Soufyan, Khalid ibn Walid et Zoubayr ibn Awwam.[2]   Les versets étaient écrits sur des pièces de cuir, sur des parchemins, sur l’os d’omoplate de certains animaux et sur des tiges de palmier desséchées.[3]





La codification du Coran sous forme de livre a été faite peu après la bataille de Yamamah (en l’an 11 de l’Hégire – 633 de notre ère), après la mort du Prophète, durant le califat d’Abou Bakr.  De nombreux compagnons sont morts en martyrs au cours de cette bataille et l’on craignait qu’à moins qu’une copie écrite du Coran tout entier ne soit produite, certaines parties puissent être perdues à jamais avec la mort de ceux qui les avait mémorisées.  Par conséquent, suivant la suggestion d’Omar de mettre le Coran tout entier par écrit, Zaid ibn Thabit fut nommé par Abou Bakr à la tête d’un comité qui allait devoir colliger tous les versets écrits ici et là et produire une copie renfermant le Coran dans toute son intégralité.[4]  Afin de préserver cette compilation de toute erreur, le comité n’accepta que les écrits qui avaient été rédigés en présence du Prophète et exigea deux témoins fiables à l’appui, qui avaient réellement entendu le Prophète réciter les versets en question.[5]  Une fois complétée et approuvée à l’unanimité par les compagnons du Prophète, cette copie du Coran fut gardée par Abou Bakr (mort en l’an 13 de l’Hégire), puis transférée au calife ‘Omar, puis à fille d’Omar et veuve du Prophète, Hafsah.[6]





Le troisième calife, Outhman (calife entre l’an 23 et l’an 35 de l’Hégire) demanda à Hafsah de lui envoyer le manuscrit du Coran, qui était sous sa garde, et demanda qu’on en fasse plusieurs copies reliées.  Cette tâche revint aux compagnons Zaid ibn Thabit, Abdoullah ibn Az-Zoubair, Sa’id ibn As-’As, et Abdour-Rahman ibn Harith ibn Hisham.[7]  Lorsque les copies furent complétées (en l’an 25 de l’Hégire), Outhman rendit à Hafsah le manuscrit original et envoya les copies aux principales provinces musulmanes.





Un certain nombre d’érudits non-musulmans qui ont étudié la question de la compilation et de la préservation du Coran ont conclu à l’authenticité de ce dernier.  John Burton, à la fin de son ouvrage étoffé sur la compilation du Coran, affirme que le Coran, tel que nous le connaissons aujourd’hui, est :





« … un texte qui nous est parvenu exactement sous la même forme que celle dans laquelle il a été arrangé et approuvé par le Prophète. (…)  Ce que nous tenons aujourd’hui dans nos mains, c’est le moushaf de Mohammed. »[8]





Kenneth Cragg décrit la transmission du Coran de l’époque de la révélation à nos jours comme « un texte qui a traversé les siècles en une succession ininterrompue de dévotion. »[9]





Schwally, quant à lui, affirme que :





« En ce qui concerne la révélation, nous pouvons être certains que la transmission de son texte a été faite en respectant avec exactitude la disposition qu’en avait faite le Prophète. »[10]





La crédibilité historique du Coran est encore soutenue par le fait que l’une des copies envoyées par le calife Outhman existe toujours aujourd’hui.  Elle se trouve au musée de la ville de Tashkent, en Ouzbékistan.  Selon le programme « Mémoire du monde » de l’Unesco, une division des Nations Unies, « il s’agit de la version définitive, connue comme étant le moushaf de ‘Outhman. »[11]





 Ce manuscrit, gardé par le Conseil musulman d’Ouzbékistan, est la plus ancienne version écrite du Coran.  Il s’agit de la version définitive, connue sous le nom de « moushaf de ‘Outhman ».  Cette photo est une courtoisie du Registre international de la Mémoire du monde.





 





 Un fac-similé du moushaf qui se trouve à Tashkent est disponible à la Bibliothèque de l’Université de Columbia, aux Etats-Unis.[12]   Cette copie est une preuve que le Coran qui est en circulation, de nos jours, est identique à celui de l’époque du Prophète.  Une copie du moushaf envoyée en Syrie (et reproduite avant qu’un incendie ne détruise la Mosquée Jaami’, où elle se trouvait, en 1892)  se trouve également au Musée Topkapi d’Istanboul [13]et, un manuscrit ancien, rédigé sur des peaux de gazelle, se trouve à Dar al-Koutoub as-Soultaniyyah, en Égypte.  D’anciens manuscrits datant de diverses périodes de l’histoire islamique trouvés à la Bibliothèque du Congrès, à Washington, au Musée Chester Beatty, à Dublin (Irlande) et au Musée de Londres ont été comparés à ceux de Tashkent, de Turquie et d’Égypte, et il a été conclu qu’aucun n’avait subi la moindre modification et que tous correspondaient au texte original.[14]





 Par ailleurs, l’Institut Koranforschung, de l’Université de Munich (Allemagne) a recueilli près de 42 000 copies anciennes du Coran, certaines complètes et d’autres non.  Après environ cinquante années de recherches, ils ont rapporté n’avoir trouvé aucune différence entre les différentes copies, à l’exception d’erreurs de copistes occasionnelles, qui étaient faciles à repérer.  Cet institut a malheureusement été détruit par les bombes durant la deuxième guerre mondiale.[15]





 





 Ainsi, grâce aux efforts des compagnons du Prophète, et avec l’aide de Dieu, le Coran que nous possédons aujourd’hui est récité de la même manière que lors de sa révélation.  Cela en fait l’unique Écriture religieuse qui soit encore mémorisée complètement et comprise dans sa langue originale.  Comme le déclarait Sir William Muir : « Il n’existe probablement aucun autre livre, dans le monde, qui soit passé à travers douze siècles [aujourd’hui quatorze] tout en conservant une telle pureté de texte. »[16]





Cela confirme d’ailleurs la promesse faite par Dieu, dans le Coran :





« En vérité, c’est Nous qui t’avons révélé le Rappel; et c’est Nous qui le garderons, certes, (contre toute altération). » (Coran 15:9)





Le Coran a été préservé à la fois sous forme orale et sous forme écrite, comme aucun autre livre ne l’a été; et chaque forme a constitué une preuve de l’authenticité de l’autre.





Allah, exalté soit-Il, dit (sens du verset): « En vérité c’est Nous qui avons fait descendre le Rappel (Coran), et c'est Nous qui en sommes gardien. » (Coran : 15/ 9).





Ibn Jarir At-Tabari a dit dans son Tafsir au sujet commentaire de ce verset : « Allah le Très Haut a dit : « nous avons fait descendre le rappel » ; celui-ci désigne le Coran et « nous en assurons la préservation » c’est-à-dire nous protégeons le Coran de sorte qu’on ne pourra pas y ajouter de faux éléments qui n’en font pas partie et ne pourra enlever une partie de ses dispositions, de ses peines et de ses prescriptions. » (Fin de citation)





As-Saadi pour sa part a dit dans son Tafsir en commentant ce même verset : « Nous avons fait descendre le rappel ». Celui-ci désigne le Coran qui rappelle toutes les questions et tous les arguments clairs et qui permet à celui qui veut se souvenir de le faire. Et « nous en assurons la préservation » c’est-à-dire : pendant et après sa révélation. Dans le premier cas, nous le protégeons contre l’écoute de la part de tout démon damné. Dans le second cas, Allah l’a déposé dans le cœur de Son messager qui l’a transmis aux cœurs des membres de sa communauté. Allah a préservé ses mots du changement, de l’augmentation et de la diminution comme Il a préservé ses sens de toute altération. De sorte que, chaque fois on a tenté de modifier son sens, Allah met à la disposition (des croyants) quelqu’un qui rétablit la vérité évidente. Ceci fait partie des plus importants signes d’Allah, de Ses bienfaits accordés à Ses serviteurs croyants. La préservation du Coran implique la protection de ses partisans contre leurs ennemis de sorte qu’aucun ennemi ne parviendra à les écraser ».





La révélation du Coran au Prophète () s’est faite progressivement durant 23 années. A ce propos le Très Haut, exalté soit-Il dit (Sens du verset): « (Nous avons fait descendre) un Coran que Nous avons fragmenté, pour que tu le lises lentement aux gens. Et Nous l'avons fait descendre graduellement. » (Coran : 17 /106).





Dans son Tafsir As-Saadi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit à propos de ce verset: « Ceci signifie : nous avons révélé le Coran progressivement pour distinguer la guidance de l’égarement, le vrai du faux : « pour que tu le lises lentement aux gens » signifie doucement pour leur permettre de le méditer, de réfléchir sur son sens et d’en tirer des connaissances et : « Nous l'avons fait descendre graduellement » c’est-à-dire petit à petit donc progressivement et durant 23 années.





A l’époque de la révélation du Coran, l’écriture était rare chez les arabes. C’est d’ailleurs pourquoi Allah les a décrits en ces termes (sens du verset): « C'est Lui qui a envoyé à des gens sans Livre (les Arabes) un Messager des leurs. » (Coran : 62/ 2). Ils se contentaient de mémoriser le Coran. Seul un petit nombre d’entre eux écrivait certains versets ou sourates sur des peaux ou des pierres lisses ou d’autres supports.





Au début de la révélation, le Prophète () interdisait l’écriture d’autres choses que le Coran. Il leur défendit à titre provisoire de transcrire ses propres paroles afin qu’ils se consacrassent à la mémorisation du Coran et à sa transcription et ne pussent confondre la parole du Prophète () avec celle d’Allah le Très Haut, pour mieux préserver le Coran contre tout ajout ou diminution. Il avait même choisi un groupe de Compagnons fidèles et bien instruits qu’il chargea de la transcription des versets coraniques. Ce groupe de Compagnon connu à l’époque par « les scribes de la Révélation » comprenait en plus des quatre califes, Abd Allah ibn Amr ibn al-As, Mouawiyya ibn Abi Soufyan et Zayd ibn Thabit (qu’Allah soit satisfait d’eux).





Le Coran resta donc préservé dans la mémoire des Compagnons et sur des peaux et d’autres supports jusqu’à l’avènement du califat d’Abou Bakr as-Siddiq (Radhiya Allahou ‘Anhou). Au cours des guerres d’Apostasie, de très nombreux Compagnons ayant appris le Coran par cœur furent tués et Abou Bakr, sur conseil de ‘Omar qui craignit que leur disparition n’entraînât la perte du Coran, confia à Zayd ibn Thabit, qui maîtrisait le mieux le Coran, la tâche de rassembler le Coran dans un seul volume pour pouvoir le préserver.





La deuxième compilation du Coran eut lieu lors du califat de ‘Outhman (Radhiya Allahou ‘Anhou). Ce dernier constatant, d’une part les divergences entre les instituteurs du Coran et leur sectarisme pour la récitation qu’ils avaient apprise et leur désapprobation des autres et l’ignorance des nouveaux musulmans de tout ce qui touche aux sept modèles de récitation « Al-Ahrouf As-Sab’ » d’autre part, pris la décision de réunir les gens autour d’un seul Moushaf conforme à la langue de Qouraych, qui est la langue de la révélation du Coran. Il chargea une commission présidée par le même Zayd ibn Thabit de ce travail et lui ordonna de se baser sur la compilation faite au temps d’Abou Bakr qu’il avait emprunté de Hafsa pour l’occasion. Lorsque la commission eut achevé son travail, ‘Outhmam restitua à Hafsa son Moushaf, envoya dans chacune des grandes régions de l’empire islamique une copie et ordonna que soit bruler tout autre support du Coran.  





Le Prophète () qui ne savait ni lire ni écrire, insistait d’abord auprès de ses compagnons pour que les versets soient appris par cœur au fur et à mesure de leurs révélations : on les récitera aux prières liturgiques. En particulier, le Prophète Mohammed () a pris l’habitude, durant le mois de Ramadan, de réciter la totalité du Coran alors connue, lors de prières supplémentaires, les prières du Tarawih. Sous la surveillance de Gabriel, la mémoire de Mohammad () devenait “plus féconde que le vent portant la pluie”.





Pendant le dernier Ramadan du Prophète (), Gabriel lui fera réciter par deux fois la totalité du Coran, lui signifiant ainsi doublement l’achèvement de sa mission et sa mort prochaine. La tradition d’apprendre le Coran par cœur est donc bien ancrée dans le cœur des musulmans.





Mais les compagnons lettrés prennent également l’habitude de noter les versets par écrit. A partir de quelle date exactement, on ne le sait. Toujours est-il que cinq ans après la première révélation, des traces écrites existent déjà. Et de cela on en est sûr, car c’est à cette époque que le futur Calife Omar, séduit par la lecture de la sourate 20, se convertit à l’islam.


Cette transcription du Coran, alors qu’à cette époque, n’existe par écrit en langue arabe qu’un petit nombre de poèmes, trouve somme toute son bien fondé dans le fait que la première révélation parle déjà de l’importance de l’écrit, de l’enseignement par le calame.





Tout comme le Prophète () faisait réciter ses Compagnons, il dicte aux scribes les versets, faute de papier tous les matériaux sont bons : morceaux de parchemin, cuir tanné, tablettes de bois, omoplates de chameaux, morceaux de poterie, nervures médianes des dattiers... Au fur et à mesure, les versets, comme un puzzle s’agenceront, le Prophète Mohammed () précisant l’emplacement des versets dans les sourates, et des sourates dans l’ensemble du Livre. En effet, si quelquefois, toute une sourate fut révélée d’un coup, à d’autres occasions, les fragments d’une même sourate vinrent avec des intervalles, à d’autres encore, plusieurs sourates étaient commencées simultanément et se poursuivaient avec des interruptions.





Par le double contrôle oral et écrit, le Prophète () s’assure de la conservation de l’intégrité du texte. Les mémoires défaillantes peuvent s’appuyer sur un texte écrit, et dans l’autre sens, les erreurs de copie sont corrigées grâce à la mémorisation du texte.


Ainsi, pas un iota du texte sacré ne pourra être modifié par erreur.


Lorsque le Prophète Mohammed () quitte ce monde, plusieurs Compagnons ont  la chance d’avoir retenu par cœur la totalité des versets. Par contre, il n’existe pas de texte complet du Coran. Sur le coup, personne ne s’en émeut outre mesure. La bataille de Yamâma va faire prendre conscience de ce manque.





Là, cinq cents d’un groupe de trois mille musulmans de la première heure et comptant parmi les plus grands connaisseurs du Coran, trouvent la mort. Omar prend alors conscience du danger et s’en va trouver le Calife Abou-Baker et lui :





“Les compagnons de l’Envoyé d’Allah tombent dans la bataille d’Al- Yamâma à la façon de papillons dans le feu, et je crains qu’ils le fassent chaque fois qu’ils rencontraient une occasion pareille de se faire tuer en martyrs, cependant qu’ils sont les porteurs du Coran. Par leur mort le Coran risque de se perdre et d’être oublié. Si tu le réunissais et le faisais écrire?”





Pendant les dernières années de sa vie, le Prophète () employait de manière officielle des secrétaires, les uns pour les tâches courantes, d’autres pour la transcription de la révélation coranique. Le jeune Zaïd ibn Thâbit faisait partie de ce dernier groupe. Il était même devenu le scribe principal du Prophète () et comptait parmi les personnes qui connaissaient la totalité du Coran par cœur.





Tout naturellement, le Calife Abou-Baker le chargera donc de réunir le Coran dans son ensemble. Mais le Calife, avec le scrupule qui le caractérise, tient à ce que toutes les précautions soient prises : pour chaque verset, Zaïd devra trouver au moins deux témoignages écrits, avant de l’inclure dans la copie définitive. Et le calife demandera aux habitants de Médine d’apporter les fragments écrits qu’ils possèdent. Sur la totalité du Coran, la Tradition nous apprend que seuls deux versets ne se trouvèrent par écrit que chez une seule personne. Cette copie appelée Moushaf (feuilles réunies), sera conservée par le Calife Abou-Baker et après lui par son successeur Omar.





Pendant ce temps, l’enseignement du Coran est encouragé dans tout l’empire musulman, qui ne cesse de s’accroître. Omar, toujours perspicace, entrevoit le besoin d’envoyer des copies du Moushaf dans les principaux centres, afin d’éviter tout risque de déviation, et d'erreurs de prononciation dans les pays non-arabes. Mais il n’en aura pas le temps, et c’est le troisième Calife Othman qui s’en chargera.





Il demandera à une commission présidée par le même Zaïd ibn Thâbit d’établir sept copies à partir du Moushaf, en autorisant la révision de l’orthographe dans le sens d’une plus grande lisibilité du texte, en particulier pour les non arabophones.





 Après lecture publique de la nouvelle édition devant les savants du Coran que compte Médine, ces copies sont envoyées aux quatre coins de l’empire, avec ordre du calife de détruire tout texte ne correspondant pas au texte officiel. En effet, certaines divergences existaient du fait d’erreurs de copie, ou encore de la prise en compte d’un commentaire comme faisant partie du texte. Et il importait que ces textes inexacts soient détruits.


Des copies envoyées par Othman, il en reste de nos jours une, complète, que l’on peut admirer au musée Topkapi d’lstanboul, et une autre où il manque quelques feuillets à Tachkent. Et entre ces copies et les millions d’exemplaires éditées de nos jours, aucune différence...





Ou plutôt si, une différence existe, quant à l’orthographe. En effet, à l’époque de la révélation, l’écrit venait à peine de faire son apparition. Pour les vingt huit lettres que compte l’alphabet, seuls quinze signes différents existaient. Ainsi le b, le t, le th, le n et le y avaient presque la même façon de s'écrire et n’étaient pas différenciés par ce qu’on appelle des signes diacritiques : les points sur ou sous les lettres en arabe, les accents en français. On reconnaissait donc les lettres selon le contexte, leur emplacement dans le mot. De même, si en arabe, les voyelles longues sont représentées, les voyelles courtes et d’autres signes ne le sont qu’exceptionnellement, quand il y a ambiguïté. Ce sont en effet les fonctions grammaticales des mots qui permettent de les deviner. Tel est encore le cas dans l’arabe écrit courant. Cette écriture ne permet donc pas à une personne qui n’est pas versée dans la littérature arabe de lire le Moushaf correctement.





 Le Coran bénéficia donc jusqu’à la deuxième moitié du premier siècle de l’Hégire de différentes réformes orthographiques pour être tel que nous le connaissons actuellement.



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